Bienvenue dans la retranscription de l’édition « Passionnément », où chaque mois en partenariat avec RCF Saint-Étienne, vous retrouverez l’interview d’un commerçant Stéphanois du livre Côté Comm’, passionné par son métier autant que par ses produits.
Place à Jacques-Philippe Champailler de la boutique Optique 42.
RCF: Bonjour !
J-P. Champailler: Bonjour !
RCF: Donc Stéphanois, fier de l’être?
J-P. Champailler: Oui !
RCF: Est-ce que c’est cela qui a motivé votre installation, en l’occurrence la reprise de ce magasin, ici à Saint-Étienne?
J-P. Champailler: En partie oui: encré localement, familial, amitiés aussi, qui m’ont donné envie de rester sur Saint-Étienne et de reprendre ce magasin.
RCF: Le quartier, Centre Deux, un quartier qui bouge beaucoup en ce moment. C’est un quartier facile? C’est un quartier dont on connaît peu être mieux les habitants qu’ailleurs ou pas?
J-P. Champailler: Pas plus qu’ailleurs, c’est un quartier qui est très cosmopolite qui a beaucoup évolué ces dernières années. La réfection de Centre Deux tant attendue est presque terminée enfin du moins, amène un dynamisme qui avait été perdu ces dernières années. Beaucoup de passages : trams, voitures piétons… Mais, on en veut toujours plus !
RCF: Qu’est-ce que cela veut dire « on en veut toujours plus »?
J-P. Champailler: Plus de clients, enfin plus de passages, qu’il y ai plus de monde dans les rues de Saint-Étienne qui consomment dans les commerces stéphanois et pas sur d’autres villes autour, comme Lyon ou d’autres agglomérations.
RCF: Même pour les lunettes les gens peuvent aller ailleurs que là où ils habitent?
J-P. Champailler: Oui, la proximité avec leur lieu de travail dans certains cas ou facilité d’accès et de stationnement sur des zones commerciales extérieures.
RCF: L’optique, un choix d’activité qui est venue de quelle façon?
J-P. Champailler: Un peu par hasard, un peu par rapport au côté science, côté scientifique de la vue, que cela soit l’œil en allant à l’optique en générale.
RCF: Aller jusqu’à l’ophtalmologie cela ne vous branchait pas si je peux dire?
J-P. Champailler: Non le côté purement médicale, pathologique n’était pas quelque chose qui m’intéresse. Plus le côté technique et manuel des sciences qui m’intéressaient.
RCF: Et donc avant de reprendre ce magasin ici 2 rue des Dr Charcot, vous aviez d’autres expériences dans des magasins d’optique?
J-P. Champailler: Oui aussi bien à Saint-Étienne qu’en Haute-Savoie, j’ai déjà eu d’autres expériences.
RCF: Qu’est ce qui change quand on prend soi même les choses en main? Qu’on est son propre patron?
J-P. Champailler: Il faut gérer beaucoup de chose. Aussi bien les achats, les clients, l’atelier, les réparations, la comptabilité en partie, les relations avec les mutuelles et les fournisseurs. Il faut tout faire.
RCF: Parce que vous êtes tout seul du coup, c’est un choix?
J-P. Champailler: Oui c’est un choix, le personnel, il y a des difficultés de recrutement comme dans beaucoup de secteurs. Après les clients me font confiance, est ce qu’amener du personnel maintenant, c’est difficile. Peu être qu’un jour avoir du personnel pour essayer de développer un peu plus l’activité mais il faut expliquer aux clients justement qu’il n’y aura pas que moi et cela peut parfois poser problème.
RCF: Alors j’évoquais les lunettes, c’est en partie pour cela que l’on vient chez vous, mais là, je vois d’autres choses dans votre magasin. À commencer par des jumelles par exemple. Un casque avec des lunettes qui font plus penser à des pilotes d’avion de chasse. Pourquoi ce présentoir avec ce casques et ces lunettes très particulières?
J-P. Champailler: C’est un casque publicitaire de la marque Randolf qui fabrique les lunettes pour l’armée américaine depuis 1973, qui est leur fournisseur au départ avant d’avoir un contractant, et je suis dépositaire de cette marque de lunettes qui les équipe et différents services américains.
RCF: Venons-en justement aux caractéristiques des produits que vous vendez. Il y a tout simplement le désir de chacun de voir correctement de près et de loin. Est-ce que des lunettes comme celles-ci que vous venez de nous décrire qui sont probablement très techniques pour des pilotes de chasse, offrent des caractéristiques différentes, supplémentaires par rapport au fait de pouvoir lire et voir?
J-P. Champailler: Là ce sont des lunettes non correctrices, des lunettes de soleil classiques. Qui vont améliorer les contrastes, ce dont ont besoin les pilotes de chasse ou dans d’autres activités. La différence avec les lunettes de vue qu’elles soient solaires ou en verres blancs, là il y a une technique en fonction du verre en fonction des besoins de chaque personne.
RCF: Le métier d’opticien a beaucoup évolué au cour des années, lorsqu’on rentrait dans un magasin on venait pour acheter des lunettes, aujourd’hui on vient avec une ordonnance, mais qui peut déjà avoir quelques années, vous allez pouvoir vous effectuer certaines mesures, ce qui n’était pas toujours le cas autrefois.
J-P. Champailler: On peut adapter une prescription dans le cas d’un renouvellement, à savoir que la prescription est nécéssaire dans le cadre d’un remboursement de lunettes auprès des régime obligatoires et complémentaires. La difficulté d’avoir rendez-vous chez l’ophtalmologiste à Saint-Étienne n’est pas un problème à mon sens car il y a eu plusieurs ouvertures de centres qui ont permis de raccourcir énormément les délais. Je fais du renouvellement avec adaptation donc avec contrôle visuel, qui est très différent d’un examen de vue. Tout ce qui est partie pathologique, fond d’œil, tension oculaire, ne peut pas se faire en magasin, cela se fait uniquement chez l’ophtalmologiste.
RCF: Les lunettes il y a beaucoup de marques, il y a des modes sans doute aussi. Comment est-ce que vous les choisissez, rentrée après rentrée?
J-P. Champailler: Au niveau du choix des fournisseurs, en tant qu’indépendant je choisis de travailler avec qui je veux, ou du moins si c’est possible, suivant certaines exclusivités ou certains critères. J’ai fait le choix de proposer en lunettes de vue majoritairement des « origines France garanties »qui ont une certaine qualité et recherche de design, un suivi des produits au niveau du SAV. C’est important. Également la continuité du produit, la différence de grandes enseignes qui vont travailler avec des griffes qui sont fabriquées par qui des grands groupes principalement italiens ou le suivi peu être un peu plus compliqué dans certains cas.
RCF: Autant de clients, autant de désir, d’envie et de perception du visage que l’on peut avoir une fois que les lunettes sont posées sur le nez, notamment lorsque c’est la première fois que cela arrive. Il y a un côté presque psychologique dans le métier?
J-P. Champailler: Ce n’est pas toujours évident d’accepter, de se dire « il faut que je porte des lunettes »; c’est considéré comme un signe de vieillissement mais tout le monde y a droit un moment ou à un autre, c’est un besoin, la vue est un des sens les plus importants qui nous permet de travailler, communiquer, se déplacer, donc le choix du produit en fonction des besoins de la personne aussi bien professionnels, personnel, loisirs est dans certains cas plus difficiles que dans d’autres.
RCF: Comme vous travaillez seul, comment est ce que vous faites lorsque deux personnes viennent en même temps? Cela peut prendre du temps !
J-P. Champailler: En même temps, ça m’arrive d’avoir du monde en même temps évidement, mais c’est une question d’organisation. C’est rare que deux personnes, rentrent exactement au même moment pour exactement la même chose… Il y a toujours un décalage, donc on arrive entre le choix de la monture, le temps de réflexion laissé à la personne, le temps de choisir les verres, cela permet d’avoir un certain roulement.
RCF: Cet accompagnement n’est pas trop difficile /compliqué ? Les gens sont tous différents, peuvent parfois être exigeants?
J-P. Champailler: Il faut déjà expliquer ce qui est écrit sur l’ordonnance, que la personne comprenne quel est son besoin. Déjà en expliquant, quand est-ce qu’elle va porter ces lunettes, dans quelle situation dans quels types d’activité, il faut expliquer simplement déjà ce qui est écrit et décrypter l’ordonnance.
RCF: Vous avez tous les âges?
J-P. Champailler: J’ai une clientèle très large: enfants, adultes.
RCF: Cela change beaucoup?
J-P. Champailler: Il faut s’adapter: avoir un choix de produits assez large justement. Aussi bien pour tout type de personnes au niveau morphologie, âges, taille de visage évidement et critère de prix.
RCF: La concurrence est rude, il y a beaucoup d’opticiens ne serait-ce que sur Saint-Étienne, vous avez déjà évoqué d’autres villes qui sont à proximité du lieu de travail par exemple.
J-P. Champailler: Il y a de la concurrence mais il faut de la concurrence dans tous les cas, après cette concurrence, on est peu nombreux on va dire dans mon cas de figure en indépendant à Saint-Étienne. Il y a beaucoup de grandes enseignes qui travaillent complètement différemment.
RCF: Cela veut dire quoi ça?
J-P. Champailler: Ils ne proposent pas du tout les mêmes types de produits. Ils travaillent beaucoup avec des grandes marques de lunettes « griffes » ou leurs propres produits en marque distributeur. Ils n’ont pas le même fonctionnement d’accompagnement, de choix de produits et souvent dans ces magasins le personnel ne choisit pas les collections, tout leur est envoyé soit automatiquement soit par une autre personne décisionnaire. Donc ils ont des produits avec un vaste choix, même des fois très très large mais qui va être très standardisé au niveau des formes, des tailles, des couleurs. CAD ils prennent des produits qui sont les meilleures vente des fabricants qu’ils seront surs de vendre.
RCF: Est ce qu’il y’a une mode dans les lunettes?
J-P. Champailler: Évidemment, il y a eu plusieurs modes, il y a eu beaucoup de métal, beaucoup d’acétate, on est revenu sur du métal, là il y’a un large choix au niveau des formes et tailles. Là on est quand même sur des montures actuellement plus hautes, plus grandes qu’il y a quelques années. Un retour des montures épaisses qui reviennent, mais toujours avec un large choix de produits de toute tailles et épaisseurs.
RCF: Depuis 2020, le zéro reste à charge? De quoi s’agit-il rapidement et surtout est-ce que c’est quelque chose qui vous a ramener des nouveaux clients?
J-P. Champailler: Alors le 100% santé reste à charge 0 a plusieurs noms. Il n’est pas proposé de temps en temps, il est systématiquement inscrit sur le devis. Toute personne qui est bénéficiaire d’une complémentaire santé à la possibilité d’avoir un équipement reste à charge 0. Libre à lui de le prendre, de le choisir ou de ne pas le choisir, à savoir que ce n’est pas du tout la même qualité de produit, ni la même origine de fabrication des verres et des montures, avec un choix de montures restreint.
RCF: Mais dans certains cas cela peut être pour des personnes avec des problèmes financiers, cela peu être une chance parce que certains « reculaient » à se faire faire des lunettes jusqu’à présent.
J-P. Champailler: Cela a été beaucoup annoncé, en disant le renoncement au soin en lunettes, du aux coûts, ce n’était pas vraiment je pense la première chose, je dirai qu’il y a avait surtout à ce moment là avant 2020 même avant 2021, un cruel manque d’ophtalmologistes, qui manquent toujours un peu dans certaines régions en France, où c’était plus l’accès aux soins chez l’ophtalmologiste qui était un frein justement. Il y a toujours eu des offres commerciales à des prix raisonnables chez tous les opticiens quels qu’ils soient, il y a toujours eu des solutions pour s’adapter. Imposer ce reste à charge 0 par l’état n’est pas une mauvaise chose en soi, cela permet d’avoir un équipement avec un cadre défini et éviter certaine dérive sur des produits vraiment des mauvaises qualité à bas prix… Un prix quand même qui n’est pas très élevé mais qui permet d’avoir un équipement correct qui convient aux besoins de la personne, esthétiquement avec nombre de choix de montures défini par l’État.
RCF: Pour autant, le remboursement par la sécurité sociale et les mutuelles n’est pas très élevé. Les lunettes sont vraiment un outils qui améliorent le quotidien notamment lorsqu’on vieilli. Cela ne vous choque pas cette situation de « fait », vous n’y pouvez pas grand chose d’ailleurs ?
J-P. Champailler: Les mutuelles depuis plusieurs années ont voulu baisser les dépenses d’optique en disant « il faut que le reste à charge pour le porteur diminue » ainsi de suite, en baissant volontairement les prix, donc au détriment d’une partie de la qualité, alors que nous avons une grosse innovation au niveau recherche et développement des verres en France et en Europe avec une marché qui est beaucoup porté par les verres progressifs qui ont un coût de développement et de fabrication. Les mutuelles veulent rembourser le moins possible ou du moins dépenser le moins d’argent possible; au détriment de la qualité, du service etc. Le client est quand même libre de choisir son produit en fonction de ses besoins, et il est vrai que les baisses de remboursements depuis plusieurs années au niveau des montures ont beaucoup changé le choix des porteurs en les orientant vers des produits un petit peu moins chers au niveau des montures et pareil au niveau des verres.
RCF: Vous avez parlé des innovations, les verres progressifs pour la personne qui prend un peu d’âge, c’est quelque chose qui aujourd’hui est d’une qualité extraordinaire, on n’a plus de vertiges quand on baisse les yeux ou quand on les lève, coup sur coup je crois. Mais aujourd’hui qu’est ce qu’on peut dire de ces innovations, qu’est ce qu’il s’apprête à devenir intéressant les « voyants » que nous sommes, que nous avons la chance d’être encore!
J-P. Champailler: Il y a beaucoup d’innovation au niveau des verres, aussi bien sur des verres « freineur » de myopie pour les enfants, sur des verres très amincies avec un meilleur champ de vision pour la vision de loin et sur des verres progressifs avoir beaucoup plus de confort visuel. Ce sont des innovations avec des brevets de la recherche par rapport à la netteté à la facilité de nettoyage qui ont un coût final, et lorsque l’on regarde l’évolution du prix des verres progressifs sur plusieurs années; à qualité équivalente on est plutôt sur une baisse.
RCF: Une cliente vient d’entrer, elle vient d’acheter des cordons. Ce sont des accessoires que vous vendez aussi que les gens sont contents de trouver chez leur opticien?
J-P. Champailler: Oui comme d’autres produits, des jumelles, des loupes. Des aides pour grossir les textes.
RCF: Les innovations techniques bien sur on le comprend, mais des innovations / des projets qui concernent la boutique ici? Au bout de 10 ans c’est un anniversaire ! Peu être l’occasion de lancer d’autres choses je ne sais pas !
J-P. Champailler: S’occuper d’un magasin prend beaucoup de temps ! Aussi bien au niveau des achats que de la gestion de la clientèle… Mon objectif c’est vraiment de fidéliser ma clientèle et la développer évidement mais surtout garder les clients pour éviter la dispersion sur la concurrence dans d’autres magasins.
RCF: Un dernier mot sur le fait que vous faites partie de l’association Côté Saint-Étienne, l’association des commerçants. Pourquoi cette démarche?
J-P. Champailler: Il faut être solidaire entre commerçants. On peut être concurrents, confrères, même amis avec certains et se côtoyer. Mais il faut être solidaire justement pour développer le commerce à Saint-Étienne; plus il y aura de commerces plus il y aura de clients pour tout le monde. Cela permet de développer la Ville de Saint-Étienne, aussi bien au niveau économique, que le nombre d’habitants, d’infrastructure… Faire venir le maximum de monde consommer ici en intra muros, c’est vraiment important.
RCF: Dans votre domaine, internet n’est pas vraiment un concurrent?
J-P. Champailler: Un peu, sur les lentilles de contact. Et aussi sur les lunettes de soleil non correctrices.
RCF: Mais les lentilles de contact, elles sont bien correctrices, comment cela peut s’acheter sur internet?
J-P. Champailler: Le renouvellement ! Ceux qui ont déjà leur paramètres de lentilles sur la boite recommandent facilement leur lentille sur le net. Après, est-ce que la traçabilité des produits et leur stockage est parfait, on ne peut pas le savoir.
RCF: Donc, restons « local » !
J-P. Champailler: Exactement !
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